Chronologie
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Un grand inventeur alsacien : Charles-Xavier Thomas
Mise à jour Mars 2013        



Thomas de Colmar
/ J. Joly


« La vie en Alsace, 1932 »

 

 « Le 5 mai 1785, naissait dans la calme et paisible ville de Colmar, au N° 8 de la rue Kapp, Charles-Xavier Thomas, dit : de Colmar, qui devait être l’un des hommes les plus actifs et les plus entreprenants de son temps.

Novateur dans les domaines les plus divers, il fit faire un progrès immense à l’industrie des assurances par ses initiatives hardies, et fit resplendir le génie français d’un éclat nouveau par sa merveilleuse invention de la première machine à calculer industrielle : l’arithmomètre Thomas.

Sa famille anciennement originaire de Bourgogne, était venue se fixer en Alsace, à Guebwiller, pendant la guerre de Trente ans, vers 1634.

 

Thomas de Colmar

Thomas de Colmar en 1868

 

Son père, Messire Thomas, exerça la médecine à Colmar, puis à l’Hospice de la ville de Rouffach  où il mourut en 1831, conseiller municipal de cette ville.

Ses études terminées et après un rapide passage dans l’administration de la régie, Ch.-X. Thomas fit les campagnes de 1809-10-11 et 13 avec les armées françaises au Portugal et en Espagne. Successivement caissier général des vivres à l’armée du Portugal en 1809, directeur du magasin des vivres du quartier général de l’armée à Séville en 1810, garde-magasin général en 1813 des armées réunies opérant en Espagne, il arrive à Bayonne après la perte de la bataille de Vitoria, et y est nommé inspecteur des vivres de l’armée française.

Il déploya dans ces diverses fonctions une activité intelligente et infatigable, grâce à laquelle l’approvisionnement de ces armées fut toujours largement assuré, même aux heures les plus critiques.

C’est pendant son long séjour aux armées du Maréchal Soult, qu’obligé d’effectuer de nombreux calculs, il conçut l’idée de son arithmomètre.

Il le mit au point après son retour en France en créant, le premier, le système des roues partiellement dentées qui constitue un véritable organe de multiplication, et en obtint le brevet en 1820.

De cette merveilleuse invention date réellement l’ère de la construction industrielle des machines à calculer et de leurs applications pratiques.

On trouve une longue description de l’arithmomètre de Thomas, et d’amples détails sur son fonctionnement, dans les Annales de la Société d’encouragement pour l’industrie nationale. Citons ici les principaux passages du rapport qui fut adressé à cette société en décembre 1821 par l’un de ses vice-présidents, Mr Francoeur, professeur à la Faculté des  Sciences, rapport inséré au Bulletin de février 1822 :

« Messieurs, vous m’avez chargé, Monsieur Bréguet et moi, d’examiner une machine que vous a présenté Monsieur Thomas de Colmar et qu’il nomme arithmomètre.

La première machine de ce genre qu’on connaisse est celle que Pascal inventa à l’âge de 19 ans. Elle était fort compliquée. On a depuis imaginé sur ce modèle diverses conceptions de même nature : celle de Lépine et celle de Boistissandeau ont mérité d’être approuvées par l’Académie des Sciences. On trouve dans l’ancienne encyclopédie la description de celle de Diderot. Le défaut de toutes ces machines est de ne se prêter qu’à des calculs très simples. Toutes sont aujourd’hui tombées dans l’oubli et on ne les regarde que comme des conceptions plus ou moins ingénieuses.

Celle de Monsieur Thomas de Colmar ne ressemble nullement aux autres ; elle donne de suite les résultats du calcul sans tâtonnement et n’est faîte à l’imitation d’aucune des premières. Il est certain que Mr Thomas de Colmar n’avait pas connaissance de celles-ci quand il imagina la sienne et qu’il n’a pu s’aider des travaux de ses prédécesseurs. Il a même successivement employé et abandonné plusieurs mécanismes qui ne remplissaient pas assez bien leurs objets, avant de s’arrêter à celui qu’on voit dans la machine pour laquelle il sollicite le suffrage de la Société d’Encouragement.

La machine de Monsieur Thomas de Colmar sert à faire non seulement toutes les additions et soustractions, mais encore les multiplications et divisions de nombres entiers ou affectés de fractions décimales …. Il est réellement impossible de combiner mieux les agents de l’instrument qui vous est présenté et de surmonter les embarras du sujet. Ainsi à considérer cette machine, sous le rapport du mérite de l’invention et sous celui de la difficulté vaincue, vous ne balancerez pas à lui accorder votre suffrage ».

Un second rapport, présenté au mois de novembre 1822 par Mr Hoyau, se termine ainsi :

« L’invention de Monsieur le Chevalier Thomas de Colmar nous paraît devoir être rangée au nombre de ces découvertes qui font honneur à ceux qui les conçoivent et sont glorieuses pour l’époque qui les produit ».

La Société d’encouragement pour l’industrie nationale s’associant sans réserve aux conclusions de ses rapporteurs, décerna à Mr Thomas de Colmar sa grande médaille d’or. Enfin en 1920, à cent ans de distance, sur la proposition de M. Malassis, simple amateur de machines à calculer, mais l’une des personnalités les plus compétentes dans les procédés de calcul mécanique, elle a tenu à commémorer solennellement l’anniversaire du jour mémorable où, selon l’expression de son bulletin, « la première machine à calculer industrielle » avait été présentée à ses suffrages.

Dans la fête qui eut lieu à cette occasion, M. Maurice d’Ocagne, le savant professeur à l’Ecole Polytechnique, s’exprimait ainsi :

« C’est au financier Thomas de Colmar que revient sans conteste le très grand mérite d’avoir, dés 1820, créé le premier type à la fois pratique et robuste de la machine à multiplier fonctionnant en toute sécurité. On est même en droit de dire que de sa belle invention date le véritable essor pris par les machines à calculer qui n'avaient été jusque là que de simples objets de curiosité. C'est en effet à Thomas de Colmar que nous devons d'avoir des machines à calculer qui servent dans la pratique et qui ne sont pas  seulement des instruments de laboratoire ».

L'invention de l'arithmomètre Thomas, que son auteur eut la satisfaction de voir appliquer non seulement dans la généralité des compagnies d'assurances, mais encore par les services de l'artillerie au ministère de la guerre et au ministère de la marine, par les compagnies de chemins de fer, puis par la plupart des sociétés financières, lui mérita les suffrages et les distinctions les plus flatteuses.

Chevalier de la Légion d'Honneur en 1821, il devait être promu au grade d'officier par décret impérial (Moniteur universel du 15 août 1857 qui mentionne que cette nomination lui est con­férée au titre d'inventeur de l'arithmomètre).

Il serait trop long d'énumérer ici les ordres étrangers et les témoignages d'admiration qu'il reçut de partout, pour sa géniale invention.

En 1852, le Prince-Président de la République lui offrait une boîte en or à son chiffre; la même année le duc de Nassau lui faisait présent d'une bague en diamants à ses chiffre et couronne.

En 1854, l'Académie des sciences donnait son approbation à l'arithmomètre. L'année suivante Le Verrier, directeur de l'Observatoire, écrivait à Ch.-X. Thomas une lettre de félicitations.

Doué d'un jugement clairvoyant et sûr, et d'une puissance supérieure de travail, Ch.-X. Thomas, dont cette invention n'avait pas absorbé, loin de là, toute l'activité, comprit dès sa rentrée dans la vie civile, l'avenir réservé à l'industrie des assurances, alla les étudier en Angleterre où elles fonctionnaient depuis 1765, et fut un des premiers, en France, à en faire connaître les principes et à en proclamer les bienfaits.

En 1819 il fut nommé directeur de la compagnie d'assurances du «Phénix », fonction qu'il résigna bientôt, dans le but de fonder une autre société, où il pourrait appliquer libre­ment les conceptions personnelles qu'il avait en matière d'assu­rances.

Ce n'est que dix ans plus tard, qu'il réalisa son projet en créant la compagnie d’assurances contre l'incendie « Le Soleil » qui fut autorisée le 16 décembre 1829; ce fut tout de suite un modèle d'organisation dont le temps ne fit que développer les heureuses conséquences et dont nous allons rappeler succinctement les principes:

Entre temps, en 1823, il avait été nommé membre du Comité d'audition des comptes dans la société dite « Agence générale des placements temporaires et viagers sur les fonds Publics ».

Pour supprimer les inconvénients du système de la mutualité en matière d'assurance contre l'incendie, et offrir, au contraire, aux assurés les avantages de ce système et ceux des compagnies d'assurances à primes fixes exclusivement, il préconisa l'assurance en participation.

Alors que la compagnie manquait encore de toute donnée statistique relative aux risques à garantir, que tout était par conséquent incertitude et tâtonnement au point de vue des tarifs à appliquer, elle fixait une prime qu'elle savait un peu trop élevée, mais dont elle compensait le taux en admettant l'assuré au partage des bénéfices réalisés.

De plus, les statuts sti­pulaient que la moitié des membres du conseil d'administration et de ceux du comité des censeurs devaient être choisis parmi les assurés participants.

Enfin, dans l'une des premières séances du conseil d'admi­nistration de la nouvelle compagnie, il fit décider la création d'un comité d'assu­rance dans chaque localité où cela paraîtrait opportun, et dont feraient partie les actionnaires et les assurés participants domi­ciliés dans la région.

Ainsi les assurés participants devenaient de véritables coopérateurs qui propageraient les bienfaits de l'assurance, organiseraient avec le concours des autorités locales les secours contre l’incendie, feraient connaître la compagnie et contribueraient à son développement.

Ces mesures s'imposaient réellement à une époque où l'assurance était à peine connue, com­plètement ignorée même dans certaines parties de la France, surtout si l'on considère dans quelles conditions se présentaient alors les risques à garantir.

L'industrie était encore à l'état embryonnaire sauf dans le Nord, dans l'Est, en Alsace et dans le Lyonnais. Dans les campagnes, la majeure partie des constructions étaient couvertes en chaume.

Les moyens de secours contre l'incendie étaient d'ailleurs des plus précaires.

Depuis le XVIIe siècle il existait bien dans quelques grandes villes, des compagnies de pompiers, les unes rétribuées par les municipalités, les autres bénévoles et c'était la majorité, mais leur outillage était notoirement insuffisant.

A Paris par exemple, le corps des pompiers, créé à la fin du règne de Louis XIV, réorganisé une première fois militairement en septembre 1811, à la suite de l'incendie survenu pendant un bal donné à l'ambassade d'Autriche, et qui faillit coûter la vie à l'Empereur, puis renforcé en 1822, ne comprenait à cette dernière date que 14 officiers et 662 hommes, alors qu'aujourd'hui il est composé de 52 officiers et de 1803 hommes de troupe et dispose d'un matériel d'une puissance considérable.

A cette époque de 1822, les Parisiens, même dans les habitations les plus luxueuses, étaient encore tributaires des porteurs d'eau, lesquels, aux termes d'une ordonnance remontant au Consulat, étaient astreints, en prévision des incendies qui pouvaient survenir pendant la nuit, à tenir chaque soir leurs tonneaux remplis. Dans ces conditions, il n'était pas rare de voir des villages entiers devenir la proie des flammes, et les habitants n'avaient d'autres ressources pour réparer leurs pertes, que le produit des quêtes organisées par l'Administration ou par le Clergé.

Tous les obstacles qui s'opposaient ainsi à la garantie du risque furent surmontés et la compagnie du Soleil créée par Ch.-X. Thomas prit un rapide essor dans toutes les parties de la France.

C'est encore Ch.-X. Thomas qui, le premier, éten­dit la responsabilité de sa compagnie aux risques d'incendie causés par faits de guerre ou d'émeute ou par explosion de poudrières, au lendemain même d'une longue période de guerre, alors que les sou­venirs de l'invasion et des troubles de la Révolution étaient encore dans toutes les mémoires.

C'est aussi lui qui, dès l'origine de la compagnie du Soleil, fit insérer, dans ses contrats, la clause de tacite reconduction, adoptée depuis par toutes les autres compagnies, et grâce à laquelle les assurés sont prémunis contre leur propre négligence et débarrassés à jamais des frais et des soucis du renouvellement de leurs polices.

Aussi dès 1847, malgré les préventions qu'avait soulevées l'assurance contre l'incendie la compagnie du Soleil, à peine âgée de vingt ans, avait définitivement conquis la place que méritaient sa puissante organisation, sa prudence toujours en éveil, et sa loyauté.

Elle n'eut plus qu'à recueillir le prix de ses efforts et en effet, dès 1848, la compagnie du Soleil, qui était le principal actionnaire de la com­pagnie de l'Aigle dont le directeur était le fils aîné de Ch.-X. Thomas, concluait avec celle-ci un traité de réassurance réciproque qui cimentait l'alliance de ces deux compagnies; puis à la fin de 1854 elle absorba les portefeuilles des compagnies Le Globe, La Lyonnaise, La Palladium et de la Société mutuelle « La Nivernaise ».

Cette rapide prospérité entraîna l'agrandissement des services du siège social provisoirement installés dans l'hôtel de Ch.-X. Thomas, ce qui nécessita la construction du bel immeuble situé aux Numéros 51, 53 et 53 bis de la rue de Châteaudun.

Indiquons à titre documentaire que cet immeuble est situé en partie sur l'emplacement des jardins de la maison qu'occupait Joséphine de Beauharnais, à la fin du Directoire, où Bonaparte habita à son retour d'Egypte et où fut préparée la journée du 18 Brumaire. Le premier Consul s'en était rendu propriétaire en 1799.

Ch.-X. Thomas envisageait l'extension des opé­rations de la compagnie aux assurances sur la vie, lorsque la mort le frappa en mars 1870, à l'âge de 84 ans. Il avait exercé les fonctions de directeur général en animateur supérieurement intelligent, volontaire et énergique, qui jusqu'au dernier jour tint dans sa main sûre et ferme tous les fils de l'organisation qu'il avait créée.

Bien qu'il n'entre pas dans le cadre de cette biographie de suivre la compagnie du Soleil, après la mort de son fondateur, nous devons ouvrir ici une parenthèse pour rappeler qu'après la guerre de 1870/71 un léger et temporaire recul de ses opérations se rattachait à l'histoire même de l'Alsace.

En 1871, en effet, le gouvernement allemand interdit brusquement aux compagnies françaises d'assurances, l'exercice de leur industrie en Alsace et en Lorraine.

La compagnie du Soleil dû s'incliner, comme les autres, devant la force brutale. Mais ses anciens représentants continuèrent leur oeuvre avec la compagnie Rhin et Moselle, dont le distingué directeur actuel est M. Helmer.

De haute stature, d'une distinction infinie dans toute sa personne, Ch.-X. Thomas avait les allures d'un véritable gentilhomme et fut un des plus beaux cavaliers de son temps.

Il épousa à Séville une jeune fille d'une des plus anciennes et plus illustres familles andalouses, qui fut la fidèle compagne de sa vie et lui donna sept fils et trois filles, dont nous donnons ci-dessous la descendance actuelle.

 

En ligne directe :

I) Joseph Thomas d'Alvarès.

Représenté par le Marquis de Coëtlogon son petit-fils et Mme Veuve Nasi sa petite-fille.

II) Louis Thomas de Bojano.

Représenté par- Clément Thomas de Bojano; Albert Ghevrillon; Le Comte de Ronseray, les enfants de M. de Ronseray et arrières petits-fils ; la Marquise de Modène; M. Philippe Denaut, Mme Georges-Derrien, Mme Amédée Thubé.

III) La Comtesse de GRANGES DE Rancy .

Représentée par: le Comte Albert de Bertier de Sauvigny et la Marquise de Lestrange.

IV) Madame SOULTZENER.

Représentée par :la Marquise d'Escayrac et la Com­tesse d'Epremesnil.

V) La Comtesse de DALMAS.

Représentée par: la Comtesse de la Grandière; Mme de Bournet; la Comtesse de Bellecize; Mlle de Dalmas; la Baronne de Laître

 


En ligne collatérale :

I) Branche Thomas de Soultzmatt, descendant d’un cousin germain de Charles-Xavier Thomas de Colmar.

2) Branche Thomas de Barbarin, descendant de Louis Thomas, frère de Charles-Xavier Thomas de Colmar.

Représentée par: Guillaume Thomas de Barbarin; Magdeleine Thomas de Barbarin; Geneviève Thomas de Barbarin; Mme Charlotte Thomas de Barbarin.

3) Branche Goetschy descendant d'Henriette Thomas de Colmar, soeur de Charles-Xavier Thomas de Colmar.

Représentée par le Général Gœtschy

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2013