Modélisation et construction de l’arithmomètre Thomas 1820

Le chariot

 

 

I) Description du chariot

 

A) De la largeur du chariot

Le chariot dessiné dans le brevet est de toute évidence beaucoup trop étroit pour contenir l'intégralité des cadrans et des roues horizontales n.
Il apparaît que près du tiers du mécanisme (cadrans et roues n, situées juste en dessous), dépassent de la platine du chariot ! (Fig. A).
Cela pourrait bien venir se glisser sous la platine principale, mais il deviendrait alors impossible de soulever et de déplacer le chariot, comme l’a démontré la réalisation de notre première maquette.

D'autre part, les roues  horizontales n ne seraient plus en phase avec les roues m (verticales), situées à proximité immédiate de la ligne qui séparent les deux platines. Elles viendraient même buter contre les fourchettes q et les roues de retenue p.

Enfin, le fonctionnement de la retenue deviendrait impossible car les chevilles t exerçant dans cette configuration une poussée quasi tangentielle, ne pourraient s'échapper par rotation et viendraient bloquer la machine.

  
B)  Positionnement des chevilles t (Retenue)

Si la dimension des cadrans et roues n conditionnement en partie les dimensions du chariot,  le positionnement des chevilles t est d'une importance cruciale. Car c’est en poussant la tige ronde r que la fourchette q va se déplacer, et entraîner avec elle, par un mouvement de translation, la roue p pour la placer en position d'engrenage, donc de retenue.
Elle ira même jusqu'à conditionner l'emplacement de la tige r, pour que, au mieux, la poussée puisse se faire, et l'échappement aussi. !

 

C) Les options (types de poussée)

a) Poussée tangentielle
 

En tournant, la cheville t, placée sous le cadran c', va pousser l'axe r sur lequel est fixé la fourchette q ... (voir mécanisme de retenue).
Jusque là tout va bien, mais faute de pouvoir s'échapper dans sa rotation vers la droite (Fig. D), parce que butant contre la tête de l'axe r qui ne peut plus avancer, la machine va se bloquer irrémédiablement.
Une poussée strictement tangentielle est impossible dans cette configuration (Fig.D).

b) Poussée oblique

Celle-ci est la seule viable pour notre machine !
Elle imprime une poussée suffisamment tangentielle pour que l'axe r avance de 3mm environ et offre un échappement suffisant pour que le mécanisme ne se bloque pas (Fig. E). Le champ d'opération doit se situer obligatoirement dans le quart inférieur gauche de la roue n, le plus à l'extérieur possible !

► Cet impératif technique a une incidence directe sur le positionnement de la l'axe r. Celui-ci devra être légèrement décalé par rapport au dessin du brevet initial (Optimisation du processus).

► L'autre impératif est lié au déplacement circulaire de la cheville t. En continuant son chemin, celle-ci va venir buter contre la platine arrière de la cage principale, et bloquer le mécanisme.
On devra pratiquer dans la platine arrière des coupes suffisantes pour permettre aux chevilles de poursuivre leur trajectoire (Planche générale : Fig. 8 et 10)

 

c) Poussée radiale

N'effectuant aucune poussée tangentielle, cette option ne peut être employée sur notre arithmomètre !
En revanche, le principe mérite d'être cité car il est utilisé sur la machine de 1822 (Fig. F). Ici, l’axe r, maintenu par une goupille, est maintenu en position contrainte. Lorsque la goupille s’échappe au passage d’un plan incliné (qui remplace la cheville t), l’axe r avance en direction du chariot et engrène avec une dent de retenue, extérieure au cylindre.

 

 

Illustrations

 

Fig.  A
Sur le dessin du brevet, le chariot est trop étroit .
Les roues n et les cadrans dépassent de 30 %.

 

Fig.  B
Le chariot, élargi, contient désormais l'ensemble de son mécanisme

 

 Fig.  C
 Le chariot, en vue transversale

 

Fig. D
Poussée tangentielle
La cheville t pousse l'axe r mais ne peut s'échapper, bloquant le système 


 Fig. E
Poussée oblique
La cheville
t pousse l'axe r et s'échappe par le côté. Un coupe effectuée sur la  platine
arrière permet à la cheville de continuer son orbite (voir fig. 8 et 10)


 Fig. F
Poussée radiale
Système employé sur le modèle de 1822
Le mécanisme de retenue est inverse. Une goupille s'échappe par poussée
latérale et fait avancer l'axe r. La roue p s'avance et engrène avec la dent de retenue

 

Fig. G

Modèle 1822 

 

Fig. H
Numérotation complémentaire
Cadran de 40 chiffres. La lucarne doit se positionner de telle sorte
 qu’un nombre et son inverse se situe sur une même ligne horizontale.


Fig.  I

 

Fig. J
Le chariot se déplace en levant celui-ci, puis en le glissant sur des
fentes aménagées sur les deux supports a’.

 

 

D)  Numérotation complémentaire

 

La machine ne disposant pas d'inverseur de marche pour effectuer les opérations de Soustraction/Division, Thomas utilise le principe de la numérotation complémentaire  (Fig. H), déjà connu et intégré au 17ème siècle sur les machines de Pascal.
A l'aide d’un cache en laiton, que l'on fait glisser, on fait apparaître aux lucarnes l'une ou l'autre de deux numérotations en sens inverse. Tout se passe comme si les roues totalisatrices tournaient en sens inverse (Planche générale : Fig. 3a).

 

E) Les cadrans

 Sans doute pour des raisons techniques, Thomas choisit de doubler le nombre de dents des roues totalisatrices n,  passant de 10 à 20
Tailler dans un pignon un nombre de dents quelconque n'était pas une difficulté pour les horlogers de l'époque. Mais les engrenages comportant  de petits nombres de dents (inférieur à 12) étaient plus difficiles à fabriquer.

Ceci a une conséquence directe sur la numérotation des cadrans, situés juste au dessus. Si une dent correspond à une unité décimale, la suite 0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7 ,8, 9 devra être doublée pour que la concordance soit faîte avec les 20 dents de la roue n.

Avec la numérotation complémentaire, on se retrouve donc avec 40 chiffres à imprimer sur chaque cadran, répartis sur deux cercles concentriques ! un cercle numéroté dans l’ordre croissant, l’autre dans l’ordre décroissant pour la numérotation complémentaire.

Nota : Pour éviter que la roue n et son cadran ne tournent trop librement, on placera sur son côté un petit ressort en arc de cercle, qui par simple frottement limitera tout déplacement non voulu du cadran. Ce système est celui utilisé dans la machine de 1822 et donc le plus proche chronologiquement.

 

F) Positionnement des lucarnes

 

Le positionnement des lucarnes est étroitement lié à la situation respective de chaque chiffre par rapport à son chiffre complémentaire (Planche générale : Fig. 3).
Ils doivent être situés sur une même ligne horizontale pour que l'un ou l'autre puisse être caché par la bande métallique (Planche générale : Fig. 3a ).
Ceci n'est possible qu'en décalant légèrement vers la gauche la lucarne par rapport à l'axe du cadran.

 

G) Déplacement du chariot

"Ce mouvement s'opère de manière à présenter les résultats des opérations, en formant en même temps les additions indispensables aux multiplications de plusieurs chiffres. Chaque fois qu'on a multiplié une somme par un chiffre, la multiplication par le chiffre suivant doit se faire après avoir transporté le chariot d'un cran de gauche à droite..."

Le système de fixation du chariot est assez curieux et l'interprétation délicate (Fig. J)
Deux glissières métalliques a' (fig. 5) fixées sur la cage principale servent de support au chariot. Lorsque l'on lève le chariot, ce dernier peut glisser de gauche à droite. On peut supposer que les fentes horizontales pratiquées sur ces supports servent à guider le chariot dans son déplacement.
Le brevet fait état d'un système à ressort permettant "de faire avancer le chariot de gauche à droite sans le secours de la main"...
Ne voyant pas très bien comment tout cela s'articule, car les dessins du brevet sont peu bavards, nous n'intègrerons pas pour le moment ce dispositif, qui n’apparaîtra que 60 ans plus tard et sur un tout petit nombre de machines

www.arithmometre.org
2007