Brevet 1420
18 novembre 1820,
BREVET D'INVENTION DE CINQ ANS
Pour une machine ou appareil appelé arithmomètre, propre à suppléer à la mémoire dans toutes les opérations d'arithmétique,
Au sieur Charles-Xavier Thomas de Colmar, directeur et fondateur de la Compagnie du Phénix, à Paris.
Description de l'appareil.
Deux plaques de cuivre (fig. 8 et 9) assemblées par quatre colonnes, forment la cage principale (fig. 6 e 7), dans laquelle sont renfermés trois systèmes de mouvement, celui du multiplicateur, celui du multiplicande et enfin celui des retenues.
A l'extérieur de cette cage et au revers de la plaque (fig. 10) est adaptée une seconde cage (fig. 3 et 4) appelée chariot, parce qu'elle se meut de droite à gauche, et réciproquement, traînant avec elle tout son système de mouvement. Ce chariot renferme des cadrans montés sur des arbres à pivots, sur lesquels sont gravés des chiffres pour indiquer les résultats des opérations.
Système du multiplicateur formant le premier mouvement.
Ce mouvement est représenté par les figures 1, 7, 8, 13 et 12; il se compose d’une suite de roues a,b (fig. 7 et 9), de chacune quatorze dents, engrenant l'une dans l'autre; une roue a, de vingt huit dents, leur transmet le mouvement, qu'elle reçoit elle-même lorsqu'on tire le ruban de soie roulé autour du cylindre d (fig. 7).
La roue c porte deux chevilles, dont l'une heurte, à chaque demi révolution, contre une des dix chevilles qui servent de dents à la roue e (Fig. 7) ce qui fait tourner cette dernière roue d'une dent de droite à gauche. Le cylindre d est muni d'un rochet, qui permet à un ressort de renvider le cordon lorsqu'il a été tiré (fig. 7).
Outre les dix chevilles f qui forment les dents de la roue e (fig. 1, 13 et 14), il en est une autre g, qui se porte, à volonté, dans l'un des dix trous dont cette roue est percée; de manière qu'en tirant le ruban de soie cette cheville vient s'arrêter à zéro, par le moyen d'une vis, contre le bras qui tient la roue e sans la gêner dans sa rotation. Pour mettre cette roue en place, on a pratiqué dans le couvercle (fig. 1 et 13), un trou rond d'un diamètre égal à celui de cette roue ; elle est portée, à son centre, par une plaque de métal h, formant bras, retenue sur le couvercle par deux vis. Autour de la circonférence de la roue e, et vis-à-vis les dix trous dont on vient de parler, sont gravés les chiffres 0,1,2,3,4,5,6,7,8,9 du multiplicateur , comme l'indique la fig. 1.
Système du multiplicande, composant le deuxième mouvement.
Sur les arbres des roues a ( fig. 2, 7 et 12), sont montés des cylindres i, qui sont découpés dans leur longueur, comme on le voit (fig. 12) de manière à présenter dix dents pointues, plus ou moins longues….[Partie erronée coupée] … les dix dents vont en diminuant, chacune, de la dixième partie de la longueur du cylindre, et les deux dernières sont de même longueur; c'est-à-dire qu'elles sont toutes deux le dixième de la hauteur du cylindre. La dernière dent ne sert que pour les retenues (fig. 12)
Ces cylindres dentés engrènent avec des roues k (fig. 6) semblables à celles m (fig. 6 et 8), portant douze dents pointues: ces roues glissent sur les arbres l, qui sont bien polis et carrés. Les roues m engrènent avec les roues horizontales n (fig. 2 et 3) portant chacune vingt dents.
Sur le couvercle de la machine, sont pratiquées autant de fentes p (fig. 1), qu'il existe de cylindres dentés ; ces fentes sont dirigées dans la longueur des cylindres et les dépassent d'un dixième par en bas ; sur le côté de chaque fente sont gravés les dix premiers chiffres de l'ordre numérique. Dans ces mêmes fentes , glissent des pièces carrées , dont une est représentée (fig. 16 ) ; ces pièces sont surmontées d'un bouton q’, et sont terminées, en bas, par une fourchette r, qui tient chacune des roues k (fig. 2 et 6 ), par un collet, sans les empêcher de tourner.
Lorsque, dans la fig. 1, on pousse les boutons q’ sur les chiffres qui doivent former la somme du multiplicande, chacune des roues k (fig. 2 et 3 ), correspond au nombre des dents des cylindres i (fig. 2, 7 et 12), qui indiquent les chiffres : de sorte que chaque tour de cylindre fait passer à ces roues le nombre de crans indiqué par les chiffres, et les roues m (fig. 2,6 et 8), qui sont montées sur les mêmes arbres que les roues k , transmettent ce même mouvement aux roues n (fig. 2, 3 et 4), qui portent les cadrans.
[Partie erronée coupée] …
Système des retenues formant le troisième mouvement.
Sur les arbres l (fig. 2 et 7), sont montées des roues p, semblables aux roues m; on voit ces roues à plat (fig. 2 et 6); elles sont aussi menées d'un point à un autre par des fourchettes q (fig. 6, 18a et 20), fixées à des arbres enveloppés, chacun , d'un ressort à boudin r’ dont l'action tend à désengrener ces roues, qui engrènent seulement avec la dent qui se trouve dans la dixième division des cylindres, de manière qu'elles ne peuvent jamais tourner de plus d'un cran, par tour de cylindre quand le ressort à boudin est tendu : ces roues ne bougent pas lorsque les ressorts sont détendus; car la dent passe alors à côté sans les atteindre.
Les cliquets s (fig. 2, 6 et 19) tiennent les ressorts à boudin tendus lorsque les arbres ont été poussés par les chevilles t (fig. 2 et 4), contre les bras u (fig. 2, 6, 18 et 19); ce qui arrive à chaque passage de zéro, où une dizaine doit être transportée sur le chiffre de gauche. Les bras v des cylindres i (fig. 2 et 25), heurtent à chaque tour les cliquets et font détendre les ressorts à boudin.
Description du chariot représenté fig. 2
a' ( fig. 4, 5 et 5a), pièce servant à fixer le chariot contre la cage principale, en lui permettant cependant de couler alternativement à droite et à gauche.
Les roues dentées n, engrenant horizontalement avec les roues m (fig. 2), sont munies, chacune, de deux chevilles pareilles à celle t, dont une heurte, chaque fois que le zéro doit être visible, contre les petits bras u (fig. 2, 6 et 18); ce mouvement fait tendre les ressorts à boudin, qui permettent alors aux roues p (fig. 2 et 3), d'engrener avec les cylindres i (fig. 2 et 7), comme on l’a dit plus haut.
Sur les roues n (fig. 2 et 3 ) sont établis des cadrans, qui portent les chiffres :
0,1,2,3,4,5,6,7,8,9,0,1,2,3,4,5,6,7,8,9.
0,9,8,7,6,5,4,3,2,1,0,9,8,7,6,5,4,3,2,1.
Des entailles laissent apercevoir deux chiffres; mais une bande de cuivre mince d’ (fig. 3a), glissant entre la plaque et les cadrans, par le moyen de boutons e’, couvre à volonté ceux d'une rangée , de manière qu'on ne voit jamais qu'un chiffre à la fois sur chaque cadran.
A l'extérieur de la cage, les arbres sur lesquels sont montés les cadrans sont munis de boutons f' (fig. 1, 3, 4, et 5 ), que l'on tourne à volonté avec les doigts pour faire paraître tel chiffre que l'on veut.
Mouvement du chariot.
Ce mouvement s'opère de manière à présenter les résultats des opérations, en formant en même temps les additions indispensables aux multiplications de plusieurs chiffres.
Chaque fois qu'on a multiplié une somme par un chiffre, la multiplication par le chiffre suivant doit se faire après avoir transporté le chariot d'un cran de gauche à droite. Par ce moyen, le dernier cadran à droite se trouve désengrené et remplacé par le second, qui est à son tour remplacé par le troisième et ainsi de suite : ce mouvement s'opère par la main en soulevant le chariot (fig. 5)
Marches de l'ensemble de la machine.
Supposons qu'on veuille multiplier 2907 par 3068, on commence par poser, en tournant les boutons f' (fig. 1) tous les chiffres à zéro, en cas qu'ils eussent été dérangés ; on tire le bouton e' à multiplication , on pousse les boutons q’ aux chiffres indiqués par le multiplicande, ainsi qu'ils sont déjà posés sur les fentes p (fig. 1); on pose ensuite la cheville g (fig. 1, 13 et 14 ), sur le chiffre 8 du multiplicateur e (fig. 1), et on tire alors le cordon de soie , jusqu'à ce que cette cheville s'arrête à zéro. Ce mouvement fait tourner la roue c (fig. 7 et 9), quatre fois, et celle-ci fait faire huit tours aux cylindres i (fig. 2 et 7), et comme les roues k (fig. 2 et 6), ont été menées par les boutons q’ (fig. 1), aux points où les cylindres n'avaient que le nombre de dents indiqué par les chiffres sur lesquels ils sont placés, il est clair que ces roues ont fait huit fois autant de crans que chaque cylindre avait de dents. Comme, sur les mêmes arbres, il existe de semblables roues, qui engrènent dans celles des cadrans du chariot, ces divers mouvements ont été transmis aux cadrans qui ont., successivement montré les chiffres correspondant au nombre de crans faits par chaque roue, et toutes les fois, en passant sur un zéro, les petites chevilles t (fig. 2 et 4), ont tendu les ressorts à boudin, et les cliquets s (fig. 2, 18, 19, 21 et 24), ont aussitôt empêché les ressorts de se détendre et ont gardé, par ce moyen, les roues p (fig. 2, 6 et 18), dans la direction de la dent isolée des cylindres, pour que, ceux-ci leur fissent faire un cran à chaque révolution quand il fallait exercer une retenue.
Les bras, ou chevilles v (fig. 2), détendent immédiatement les ressorts de manière qu'à chaque révolution les roues formant les retenues désengrènent : par ce moyen, à chaque passage de zéro, une dizaine se trouve ajoutée au chiffre de gauche: Les cadrans montrent donc le nombre 23,256, qui est le produit de, 2907 par huit.
Le dernier chiffre à droite du produit ne devant plus participer à aucun mouvement, on tire, ainsi qu'il a été dit, le chariot de gauche à droite, pour dégager le dernier cadran, qui porte le chiffre 6, lequel est, par conséquent, remplacé par celui qui porte le chiffre 5; celui-ci l'est par l'autre, et ainsi de suite.
Cette opération terminée, on en fait une semblable pour multiplier par six, qui sont les dizaines du multiplicateur, c'est-à-dire qu'on pose la cheville sur 6, et qu'on tire le cordon , ce qui donne la multiplication de 2908 par six, et comme les cadrans portent déjà la somme de 23,256 le produit de la nouvelle multiplication s'ajoute à cette somme, seulement aux quatre chiffres de gauche, ce cinquième ou l'unité ayant été désengrené; ce qui donne un produit de 197,676, qui est le résultat de la multiplication de 2907 par 68.
On continue ainsi son opération, qui, comme on le voit, est absolument la même qu'en arithmétique.
Le troisième chiffre du multiplicateur étant un zéro, on n'a rien à faire pour ce chiffre, seulement, avant de multiplier par le quatrième chiffre 3, qui est ici le dernier, on fait avancer de deux crans le chariot pour désengrener les trois chiffres de droite, afin que le produit des mille s'ajoute à la somme déjà obtenue, à partir des mille ou du quatrième chiffre, comme cela se pratique dans le calcul ordinaire. L'opération terminée, on voit le produit total de la multiplication de 2907 par 3068, qui est de 1,069,776
Il en sera de même de toutes les opérations d'arithmétique. |